De nos jours, un petit appareil en apparence anodin s’est invité à nos tables : le téléphone cellulaire. Souvent posé près de l’assiette, à sa gauche ou à sa droite, faisant office de quatrième ustensile. Certains l’aiment face vers le haut, d’autres face vers le bas. Sans contredit, il a transformé le paysage décoratif de la table et affecté la commensalité du repas.
Commensalité?
La commensalité, c’est le fait de partager un repas. De tout temps, les humains ont cherché à manger ensemble. Ils ont créé des règles régissant les comportements lors des repas, les bonnes manières. Le repas est sans conteste un acte social rempli de rituels et de codes sociaux qu’on apprend dès notre jeune âge. Manger ensemble, à travers la commensalité, c’est donc un privilège que la présence du cellulaire peut ébranler.
Certains chercheurs ont remarqué qu’une bonne commensalité favorise une bonne gestion du poids. De manière générale, le fait de partager un repas implique qu’on passe davantage de temps à table, qu’on mange plus lentement et que les aliments du repas sont mieux choisis et cuisinés. Avoir des gens à notre table a aussi pour effet de freiner les débordements alimentaires. Ce sont de bonnes raisons de ranger le cellulaire n’est-ce pas? Il y en a d’autres!
Inclusion
Selon un sociologue français très connu dans notre domaine, « le fait de manger ensemble est réputé rapprocher »[1]. Partager un repas solidifie la confiance que les personnes présentes ont les unes envers les autres. Manger avec d’autres témoigne généralement d’une affection mutuelle, d’un intérêt réciproque. Tu inclues l’autre et tu es inclus au sein d’un groupe ou d’une famille, ce qui favorise le sentiment d’appartenance. Consulter son cellulaire pendant un repas partagé équivaut donc à se priver de tous ces bienfaits.
Communication
Il a également été démontré que la présence d’un cellulaire sur la table, même éteint, dérange la fluidité de la communication et nuit aux relations. En déposant son téléphone sur la table à son arrivée, une personne indique involontairement aux autres qu’elle est là de corps mais que son esprit est toujours ailleurs. Cela génère automatiquement un doute inconscient au sujet de son intérêt à participer aux discussions.
De plus, lorsqu’un cellulaire sonne ou émet une notification, le signal déclenche le système d’inhibition[2] des personnes à table qui l’entendent. Le cerveau considère en effet le son d’un cellulaire comme un stimulus négatif. Il actionne alors un système qui engendre un repli et une fermeture dans la communication, ce qui nuit à la conversation et fragilise la relation. Aurais-tu pensé que la simple présence d’un cellulaire à table puisse avoir autant d’impact?
Enfin, un repas est un moment important de la journée, qui marque un temps de pause; pause du travail, d’une tâche, repos pour les yeux ou pour le cerveau, etc. Prendre le temps de manger, seul ou avec d’autres, participe ainsi à la diminution du stress dans un monde moderne où il est par ailleurs omniprésent.
Alors, convaincu de ranger ce petit appareil au moment du repas? Essaye-le, tu verras combien la commensalité fait du bien 😁
Judith Petitpas, Travailleuse sociale
[1] Claude Fischler et coll., 2013, Les alimentations particulières : Mangerons-nous encore ensemble demain?, Éditions Odile Jacob, p.24. [2] Guillaume Dulude, 2020, Je suis un chercheur d’or : Les mécanismes de la communication et des relations humaines, Les Éditions de l’Homme, p.365.
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